Rétrospective historique

On s'accorde à dire que la notion de jeunesse n'a pas voulu dire la même chose au cours des siècles.

Selon Philippe Aries, le Moyen Age ne reconnaissait pas l'existence de l'adolescence ou de la jeunesse. Les enfants auraient été considérés comme des adultes miniatures. Cette thèse est réfutée en partie par Olivier Galland qui y apporte des nuances. Les étudiants constituaient bien un groupe particulier (Villon) au Moyen Age. Ce qui est intéressant de noter ici, c'est l'utilisation de la scolarisation ou apprentissage intellectuel comme critère de spécificité.

Il semblerait que du Moyen Age au XVIIe siècle, l'enfance et l'adolescence ne jouent qu'un rôle social mineur. Dans les milieux pauvres, les enfants commencent à garder le bétail et se rendre utiles. Dans les milieux aristocratiques et bourgeois, les garçons reçoivent une éducation des mains du précepteur. Les filles vont apprendre au couvent les notions qui leur seront utiles dans leur futur rôle de femme.

 

Olivier Galland nous dit, cependant, que dans l'Ancien Régime, dans la société rurale, le "groupe de la jeunesse" constitue...la plus structurée des classes d'âge. Le groupe des "compagnons"- groupement de célibataires par opposition aux mariés- comprend, dans les petites localités, la totalité de la jeunesse du village et tient une grande place dans le contrôle des affaires sexuelles et la célébration des rites." (extrait de Les jeunes, Edition La Découverte, Paris, 1993). Dans les milieux aristocratiques, c'est le nom et non l'âge qui détermine l'individu, ce qui empêche toute représentation collective de la jeunesse.

C'est au XVIIIe siècle que tout commence à changer. Le siècle des lumière valorise l'éducation. L'enfant rousseauiste est considéré naturellement bon et l'éducation doit pallier à la corruption de la socialisation. Si la personne n'est plus entièrement jugée sur son nom, l'éducation et le développement des capacités individuelles deviennent essentielles pour la transmision des biens de famille. La montée de la bourgeoisie au pouvoir va affirmer l'importance de l'éducation. AU XIXe siècle, l'enseignement secondaire se développe dans la bourgoisie. Réunis ensemble, les jeunes lycéens vont créer leurs propres valeurs. Selon Olivier Galland, le mouvement romantique en serait la manifestation la plus claire.

Les trois jeunesses au XIXe siècle

La jeunesse bourgeoise

Olivier Galland nous dit qu'au début du XIXe, la loi Fourcroy (1802) organise un enseignement secondaire public, dans lequel les lycées remplacent peu à peu les les anciennes écoles centrales, pourvus d'un internat. Cet enseignement coûte cher et n'est accessible qu'à une minorité (moins de 5% en 1876). Et n'est accessible qu'aux garçons. Les filles sont éduquées à la maison ou au couvent. L'enseignement secondaire des filles se développera avec la création de l'école de Sèvres en 1881 (300 élèves!).

La jeunesse ouvrière

Si les jeunes de la haute bourgeoisie peuvent poursuivre des études secondaires, il n'en est pas de même pour les jeunes ouvriers à qui l'enseignement primaire supérieur et les écoles professionnelles sont seuls ouverts.

La gratuité des écoles s'affirme peu à peu mais les jeunes ouvriers sortent le plus souvent de l'école à 12 ans. Dans les villes, les enfants de 8 à 16 ans travaillent huit heures par jour.

Si les Anglais font la différence entre enfance et adolescence, limitant le travail des enfants de 9 à 13 ans à huit heures, il n'en est pas de même pour la France.

En 1882, la loi Ferry institue l'école obligatoire pour les jeunes de 7 à 13 ans et sera cruciale au developpement d'une socialisation populaire.

 

La jeunesse rurale

L'école apparaît dans les campagnes vers 1832, mais la plupart des enfants ne fréquentent l'école que l'hiver, lorsque les travaux des champs sont terminés.

Plus tard, vers les années 1880, l'école commence à jouer un rôle d'ascenceur social. Ceux qui ont reçu une bonne éducation primaire peuvent accéder à des métiers tels que facteur, employé des chemins de fer, garde champêtre, etc.

 

Ce qui a été accompli à la fin du XIXe siècle, début XXe.

Une nouvelle phase, l'adolescence est reconnue . L'adolescent a son statut propre, ses propres besoins et droits.

Le processus de socialisation de ces adolescents fait l'objet de sollicitudes de la part d'organismes d'etat ou religieux.

 

L'après-guerre

Après la deuxième guerre mondiale, le taux de natalité augmente. La montée des effectifs scolaires est aussi très significative. Olivier Galland note qu'entre 1945 et 1958, la population scolaire du secondaire va doubler et croitre encore de 65% entre 1959 et 1964.

 

Evolution de la population scolaire du secondaire (lycées, CEG, CET) de 1924-1925 à 1963-1964 (données Olivier Galland, Les Jeunes, p.38)

1924-1925 1937-1938 1945-1946 1958-1959 1961-1962 1963-1964
358 000 641 000 902 000 1 847 000 2 400 000 3 053 000

 

Avec la montée de la jeunesse, nait une culture jeune, avec sa musique (importée ou imitée des USA) , ses héros et ses revendications sociales (la guerre d'Algérie, Mai 68). Mai 68 marquera les dernières grandes revendications des jeunes pour la reconnaissance de leur statut de "jeunes".

Les années 80

La fin des années 70 et les années 80 seront les années de la crise. Les jeunes sont le plus durement touchés par le chômage. AU mieux, ils poursuivent des études secondaires et supérieures le plus longtemps possible dans l'espoir de trouver un bon emploi, ou dans l'absence de tout emploi.

Investis de leur statut de jeune, ils n'en demeurent pas moins dépendants.